Secret industriel et commercial : distinguer les documents communicables et non communicables Abonnés
En 2016, la doctrine de la CADA a évolué sur la question du secret en matière industrielle et commerciale dont peut se prévaloir l’entreprise attributaire ; il faut rappeler qu’en raison de l’impératif de contrôle de l’usage des fonds publics, la CADA a longtemps considéré qu’étaient communicables les caractéristiques de la prestation que l’entreprise attributaire s’était engagée à fournir ainsi que la décomposition en tranches fermes et conditionnelles, les délais d’exécution et les notes obtenues par le candidat attributaire du marché ou de la délégation. La position de la CADA était identique tant pour l’offre de prix détaillée, que pour le bordereau de prix unitaire.
Le bordereau de prix unitaire de l'entreprise attributaire n’est pas communicable car il reflète la stratégie commerciale de l'entreprise opérant dans un secteur d'activité
Dans une affaire (CE, 30/03/2016, n°37552), le centre hospitalier de Perpignan a lancé un appel d’offres ouvert pour l'assurance responsabilité civile de l'établissement. Un candidat évincé, le Bureau européen d'assurance hospitalière (BEAH), saisit la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) pour que le centre hospitalier lui communique les pièces relatives à ce marché ainsi que ses annexes. Bien que la CADA ait rendu un avis favorable, le directeur du centre hospitalier refuse de communiquer le marché de prestation d'assurance responsabilité civile conclu avec la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) et ses annexes.
Saisi, la Conseil d’État indique qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public, l’acheteur public doit communiquer les documents administratifs qu’il détient aux personnes qui en font la demande ; toutefois, le droit à communication ne s'applique qu'à des documents achevés.
Attention : le juge précise que ne sont pas communicables à l'intéressé les documents administratifs dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée, au secret médical et au secret en matière commerciale et industrielle.
Le Conseil d’État juge que, si l'acte d'engagement, le prix global de l'offre et les prestations proposées par l'entreprise attributaire sont, en principe, communicables, ce n’est pas le cas du « bordereau unitaire de prix de l'entreprise attributaire. En effet, ce document reflète la stratégie commerciale de l'entreprise opérant dans un secteur d'activité et sa communication est susceptible de porter atteinte au secret commercial ».
La CADA « considère donc que l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif ne sont pas communicables aux tiers, sans qu’il soit besoin de s’interroger sur le mode de passation, notamment répétitif, du marché ou du contrat, sa nature, sa durée ou son mode d’exécution.
Au regard des mêmes principes, l’examen de l’offre des entreprises non retenues a de même conduit la CADA à considérer que leur offre de prix globale était, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’était pas (avis n° 20160965 du 14 avril 2016). »
Les factures d’un titulaire ne sont pas couvertes par le secret en matière industrielle et commerciale
Rappelons que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux du conseil municipal, des arrêtés municipaux ainsi que des budgets et comptes de la commune (art. L. 2121-26, code général des collectivités territoriales ; CA, 10/03/2010, n°303814). Selon cette jurisprudence, l’ensemble des pièces annexées à ces documents, y compris les pièces justificatives des comptes, sont communicables à toute personne qui en fait la demande.
Se fondant sur ces dispositions, la CADA a estimé « qu’alors même que certains documents relatifs à un marché ou un contrat public passé par la commune pourraient être couverts par le secret en matière commerciale et industrielle protégé par l’article L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration, ces dispositions ne pouvaient pas faire obstacle à la communication des factures relatives à un tel marché ou contrat (avis n° 20161995 du 12 mai 2016). »
Ainsi, la CADA considère-t’elle que les factures émises par le titulaire ne sont pas couvertes par le secret en matière industrielle et commerciale ; en effet, à la différence du bordereau des prix unitaires, les factures ne reflètent pas la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé (avis n° 20162208 du 8 septembre 2016).
Source : CADA – Rapport d’activités 2016.
Ludovic Vigreux le 02 janvier 2018 - n°62 de La Lettre des Marchés Publics et de la commande publique
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